Une transaction ne peut avoir pour effet de faire revivre un marché public annulé
CAA Versailles, 20 mars 2025, Lacambe, n° 22VE02067
La commune de Chilly-Mazarin, désirant améliorer la qualité des repas servis dans ses établissements scolaires et ses centres de loisirs, décide de faire appel à la société Elres, spécialiste de la restauration collective.
Un marché est signé le 22 octobre 2018.
Mais le 29 mars 2019, le Tribunal administratif de Versailles, saisi par le préfet de l’Essonne, annule le contrat au motif que la compétence exclusive en matière de restauration scolaire appartenait non pas à la commune, mais à un syndicat intercommunal.
La société estimait, cependant, être titulaire vis-à-vis de la commune d’une créance de 249 099,67 euros correspondant aux prestations réalisées et non réglées, à laquelle il convenait d’ajouter le montant de son préjudice et les intérêts moratoires et pénalités de retard, soit un montant total de 284 120,34 euros.
Les parties ont donc convenu de conclure une transaction sur le fondement de l’article 2044 du code civil, la commune de Chilly-Mazarin acceptant de verser à la société Elres une indemnité forfaitaire de 249 000 euros.
Un élu a toutefois contesté la validité même de cette transaction, qu’il estimait être une violation de l’autorité de la chose jugée. Il introduit en conséquence un recours devant le Tribunal administratif de Versailles qui, le 13 juin 2022, annule ladite transaction.
La société Elres a alors interjeté appel de ce jugement.
Dans son arrêt, la Cour administrative d’appel de Versailles confirme tout d’abord que l’élu était recevable à contester la validité du contrat, sans que le délai de recours puisse être considéré comme expiré.
En effet, aucune mesure de publicité appropriée n’avait été prise pour déclencher le délai de recours de deux mois. Dès lors, sa requête est parfaitement recevable.
Au fond, la Cour juge que le marché du 22 octobre 2018 a été annulé et, par suite, celui-ci doit être regardé comme n’ayant jamais existé. En conséquence, il n’a pu faire naître aucune obligation contractuelle à la charge de la Commune.
Ainsi, la transaction en cause visait en réalité à redonner son plein effet à un marché résolu et ce faisant à assurer à la requérante le versement de la quasi-totalité de la rémunération stipulée par ce marché.
En ce sens, ladite transaction avait un objet illicite en ce qu’elle méconnaissait l’autorité absolue de la chose jugée par le Tribunal administratif.
En d’autres termes, le marché ayant été annulé, la Commune ne pouvait plus se prévaloir d’aucune obligation contractuelle pour fonder un versement aussi conséquent à son ex-cocontractant. Ainsi, la conclusion de la transaction revenait, en réalité, à maintenir sous une autre forme les effets d’un contrat inexistant, en méconnaissance de l’autorité absolue de la chose jugée.
Au demeurant, la Cour constate que les sommes versées par la Commune à la requérante ne correspondaient pas exclusivement à des dépenses utiles ou à un préjudice indemnisable conformément aux règles de l’enrichissement sans cause ou de la responsabilité quasi-délictuelle.
La société Elres, devenue Elior Restauration France, voit donc son appel rejeté.
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