L’obligation légale du bailleur de souscrire une assurance responsabilité civile est susceptible d’entrainer le déplafonnement du loyer

Civ. 3e, 23 janv. 2025, FS-B, n° 23-14.887

 

La loi « ALUR » n° 2014-366 du 24 mars 2014 a mis à la charge des bailleurs, en leur qualité de copropriétaires non occupants, l’obligation de s’assurer contre les risques de responsabilité civile (assurance « PNO »).

Cette obligation légale nouvelle qui pèse sur le bailleur est-elle susceptible de constituer un motif de déplafonnement du loyer d’un bail renouvelé en décembre 2015 ?

La Cour de cassation répond à la positive.

L’obligation d’assurance du bailleur copropriétaire non-occupant, intervenue en cours de bail expiré, a augmenté notablement les charges supportées par le bailleur de sorte que le loyer du bail renouvelé prenant effet en décembre 2015 doit être déplafonné et fixé à la valeur locative.

  • La création d’une obligation légale à la charge d’une partie peut constituer un motif de déplafonnement conformément aux dispositions des articles L. 145-33, 3°, et R. 145-8 du code de commerce.
  • Tel est bien le cas de l’obligation d’assurance qui pèse sur le bailleur copropriétaire non-occupant, imposée par la loi « ALUR » n° 2014-366 du 24 mars 2014.
  • La souscription volontaire à cette charge antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi est indifférente. Il importe peu le bailleur ait déjà, avant ladite loi, souscrit volontairement à cette assurance.
  • La charge nouvelle doit alourdir de manière « notable » les obligations du bailleur.

De manière tout à fait singulière, la Cour de cassation approuve ici les juges du fond d’avoir, pour apprécier le caractère notable, pris en considération l’augmentation des primes d’assurance payées volontairement par le bailleur sur la période 2007-2014. Or, sur cette période, ladite augmentation ne résultait pas de l’obligation découlant de la loi, mais bien de la souscription volontaire.

Au contraire, l’obligation découlant de la loi a impacté, sur la durée du bail expiré, seulement environ une année (de mars 2014 à décembre 2015), de sorte qu’il est difficilement concevable de l’estimer « notable ».

Il semblerait donc que la Cour de cassation accepte de prendre en considération les effets de la charge nouvelle sur la période postérieure à l’expiration du bail, ce qui, à première vue, est assez inédit – puisqu’il est classiquement jugé que la modification doive produire ses effets au cours du bail expiré – Devons-nous en déduire que le caractère notable pourrait s’apprécier au-delà de la seule durée du bail expiré ?

 

Réponse sous l’angle de la loi Pinel

  • Il a pu être jugé, au sujet de l’interdiction, issue de la loi Pinel, de transférer les grosses réparations de l’article 606 du Code civil, que l’article R145-8 du Code de commerce n’exigerait pas, pour justifier un déplafonnement, que la modification des obligations des parties ait eu lieu au cours du bail expiré mais uniquement qu’elle existe à la prise d’effet du nouveau bail.

CA CAEN, 25 novembre 2021, n°19/03390 : RJDA 5/22 n°25

  • Au contraire, d’autres décisions jugent plus classiquement que la modification des obligations des parties issue de la loi Pinel ne peut pas être prise en considération aux motifs qu’elle ne s’applique qu’à compter de la date d’effet du bail renouvelé, et non au cours du bail expiré

TGI PARIS 29 juin 2017, n°16/15417 : RJDA 2/18 n°107

 

Cette question ne semble donc pas définitivement et clairement tranchée…

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